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L'étranger - Albert Camus
Bon, ça parait impertinent pour le petit moi de commenter un monstre sacré comme Camus, mais bon, mon wiki, mon avis.
L'étranger, c'est avant tout une drôle d'impression. Qui frôle à certains instants le malaise. Beaucoup de paradoxes. Et pire, qui parfois me “condamne” (j'y reviendrai).
Meursault
Meursault c'est le personnage principal. Le centre de l'histoire. C'est un personnage singulier. C'est le personnage de l'absurde. Mais pas l'absurde par l'abandon de rigueur. L'absurde par excès de rigueur.
Au premier regard, c'est Meursault qui semble décalé, anormal, absurde. Et il l'est, évidemment. Mais d'une façon tout aussi évidente, il est aussi le levier de Camus pour dénoncer l'absurdité du monde.
Meursault, c'est avant tout l'obstination du respect de la vérité. Obstination qui tourne à l'absurde lorsqu'elle écrase le reste. Meursault refuse de mentir. Aux autres. Et surtout à lui-même. Il ne parle pas pour rien dire parce que le smalltalk, ce sont des paroles en l'air. Qu'on ne pense pas réellement, que l'on dit sans réfléchir. Des mensonges par paraisse. Meursault ne parle que lorsque c'est nécessaire.
Lorsqu'il parle, il ne dit que ce qu'il pense honnêtement. Peu importe les sentiments des autres. Peu importe les normes sociales. Peu importe les conséquences. La vérité crue, acerbe, blessante.
Toute la construction psychique de Meursault découle de cet impératif :
- il est évidemment athée.
- il donne de l'importance quasiment exclusivement au présent car le passé n'est accessible que par les souvenirs qui sont subjectifs, partiels et fluctuants tandis que le futur est évidemment incertain.
- il est devenu assez insensible. Ce qui est nécessaire pour un homme qui ne se laisse jamais rassurer en se racontant des histoires. Un homme en permanence nu, exposé aux vents froids, durs et cinglants de la vérité.
On comprend que c'est cette exigence de la vérité et ce dédain du futur qui lui permet d’énoncer sans sourciller des phrases qui “ruineront” sa destiné (qui le conduiront à la mort). Car de son point de vue il est indispensable de vivre dans l'honnêteté. Se compromettre, c'est mourir.
C'est aussi cette importance quasi exclusive donnée au présent qui explique ses relations avec tous les autres personnages. Sa mère est sortie de sa vie depuis des années. Il ne ressent plus rien pour elle. Marie ne l'intéresse qu'au présent. S'il faut se marier pour la garder avec lui aujourd'hui, qu'a cela ne tienne. Mais il ne le fait pas dans le but de la garder auprès de lui plus tard. Raymond est sympa avec lui dans l'instant et c'est ce qui compte. Pas ce qu'il semble avoir fait. Aucun compte n'est tenu des on-dit. Une future carrière à Paris ? Non merci, la vie en Algérie est aujourd'hui suffisante.
Mais avec Raymond on touche à la limite de la logique. Car Raymond ment. Pourquoi ça ne pose pas de problème à Meursault ?
Avoir compris tout cela est indispensable pour comprendre les 4 dernières pages du récit. Sa colère à l'encontre de l'aumônier. Lorsqu'il dit que les autres vivent comme des morts. Lorsqu'il considère que tout le monde est privilégié. Il dit en fait que peu importe la croyance. La vérité est que chacun est mortel. Il n'y a pas de privilégiés. Pas d'âmes sauvées ou d'âmes damnées.
Mais finalement à l'issue de sa colère, il semble renaître : à nouveau pur, innocent, lavé de sa colère et de l'endurcissement propre à son inconditionnalité face à la vérité. Prêt à ressentir à nouveau libéré son carapace d'insensibilité.
Style
Camus écrit comme Meursault ressent : sans filtre, mais aussi sans sensibilité. Les actes les plus banales sont décrit avec autant d'intensité (donc quasiment aucune) que les plus choquants. Tout est là, mais tout est plat.
Un certain malaise se ressent à la lecture de ce style. Il répond au malaise du lecteur face à Meursault. Malgré tout l'écriture reste puissante et expressive. Mais utilitaire, pas artistique.
Mise en abyme
On se prend parfois à n'être surpris du comportement de Meursault que lorsque les autres personnages le lui reprochent. Ces reproches du coup finissent par s'adresser à soi-même car l'on a manqué soi-même de sensibilité. Le récit n'en prend que plus d'impact sur le lecteur.